• Terre

    Nous abordons les villes le plus souvent par la route et son revêtement insipide. Pour chacune d'elle, le visiteur peignait dans sa mémoire un tableau unique composé d'éléments propres et saisissants, un panneau, une église, une place, une enseigne ou une statue, la succession singulière de bâtisses, et identifiait les lieux à cet ensemble. De nos jours peu d’objets particuliers nous permettent de distinguer une ville d’une autre, les panneaux se ressemblent, le mobilier urbain se normalise ainsi que les commerces ; partout les mêmes décors, rues piétonnes et enseignes, partout ces mêmes résidences lisses et quelconques. Le promeneur se lasse des traversées, recherche désespérément les indicateurs de quelques trésors citadins ou architecturaux, atteignant une place d’église, dont il découvre la flèche par surprise, déserte et morne, prise en étaux dans la verticalité de bâtiments hétéroclites enserrés les uns contre les autres. L’urbaniste pense moins au marcheur, la ville est fonctionnelle, on l’aborde en taxi, en tram ou depuis l’aéroport, accompagné par la présence éphémère de bribes pré-consommées et mimétiques, généralement évènementielles. 

    À une époque antérieure, pas si lointaine, le voyageur piéton goûtait par étapes la spécificité d’une cité, à mesure qu’il s’en approchait. D’abord de loin, depuis le chemin, les premiers éléments verticaux émergeaient, visibles d’une crête ou au travers d’une déchirure dans la végétation. La cime d’un clocher, la stature des murailles ou l’agencement des bâtiments plantés sur une hauteur, nichés dans une vallée, accrochés à une parois, regroupés comme un troupeau au milieu du paysage. Puis il passait un seuil, de l'imposante arche fortifiée à la sobre indication gravée dans du bois, derrière les premières maisons éloignées du centre. Et la voie le guidait vers la place principale où se condensaient les principales fonctions : église, mairie, banque et poste de communication, commerces. Un marcheur contemporain aurait peu de chance de vivre la même expérience, à quelque exception près.

    Eau

    Réjouissons-nous, la voie des eaux très empruntée jadis garde encore aujourd’hui une grande partie de sa configuration ancienne. Qui empruntera sur une de ces péniches de loisir le sillonnement des fleuves et des canaux plongera son esprit dans une dimension peu habituelle et dépaysante de ces villes d’ordinaire si ternes et ennuyeuses.

    Le port se gagne en soirée après une petite heure de voie rapide, de route nationale puis de voies champêtres. La traversée du village contigu introduit la rupture d’avec le monde terrestre. Deux croisements plus loin, des millions de gouttelettes en suspension s'agglutinent sur le voyageur et assombrissent la rue principale. Investis par la brume les lieux perdent leurs ombres, le visiteur est alors directement saisi par 

    Feu

    Exposition flamboyante.

    Air

    Circulation des idées. 


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